Samedi 11 octobre 1997, Nantes

Lorsqu’il a fallu que je réécoute le morceau de conversation entre Chepe et moi que j’avais enregistrée sur la puce de mon téléphone pour retrouver son adresse et son numéro, j’ai été désagréablement surpris par le ton faux de ma voix, forcé, alors que le sien était naturel et enjoué. Je ne sais pas si je parle toujours comme ça, mais ça m’a fait très mauvaise impression, et j’imagine que ça doit au moins de temps en temps en laisser une identique sur mes interlocuteurs — comme si je me moquais éperdument d’eux ; enfin comme si je n’étais pas fiable. C’est évidemment beaucoup plus souvent le contraire, et ça me laisse sans voix. Début de l’automne, avec son temps venteux, et son cortège de pluies refroidies. Je n’aurai pas travaillé de toute la semaine. Mes principaux exploits de la journée, dont j’ai passé la majeure partie au lit, sont la vaisselle en début de soirée (elle traînait depuis trop longtemps), et la lecture d’un roman policier espagnol que m’a prêté Céleste jeudi soir. N’y est bien sûr pas étranger l’événement auquel il est fait allusion dans le paragraphe précédent, et dont je n’ai pas vraiment envie de parler. Disons que mes craintes étaient fondées, et que je comprends un peu mieux les réactions de Sarah à mon encontre au printemps. Il suffit de peu pour que tout désir disparaisse et qu’une situation devienne pathétique ; penser qu’il puisse alors revenir est non seulement impossible mais détestable.