Me rappelant les conseils de Clément, qui le considère comme un chef d’œuvre, j’ai regardé religieusement Trois Vies et une seule mort de Raul Ruiz sur ma télé (avec Marcello Mastroianni qui joue quatre personnages). C’est un film qui ne se laisse pas réduire à une interprétation normale du récit. De ce point de vue, c’est même absolument incompréhensible. Il me semble impossible de relier tous les fils de façon cohérente. Ça ne me gêne pas. Au contraire. Mais je ne suis pas convaincu non plus ; trop d’éléments parasitent le principal (je n’ai notamment pas compris, dans la suite du film, le rôle de l’espèce d’aleph dans l’appartement du premier personnage. Sur le moment, il m’a semblé que c’était suffisamment exploitable, mais ensuite, il ne reparaît pas). Finit par ressortir l’idée d’un jeu qui n’est pas abouti. J’aurais préféré qu’il creuse une des voies empruntées. Ce n’est que mon avis. C’est néanmoins plus réussi que le dernier, Shattered Image, qu’on a vu au festival de Montréal — enfin, ce que je n’y ai pas aimé c’est surtout le rôle joué par Anne Parillaud, en partie un décalque incongru de celui qu’elle a dans Nikita de Luc Besson ; et William Baldwin, qui est mou. Pour le reste, cette histoire de personnages qui se rêvent les uns les autres est assez bien fichue.
Entre Borges et Cortázar (cette histoire de Shattered image me fait penser à une de ses nouvelles, mais que je n’ai pas réussi à retrouver), c’est un cinéma très marqué par l’impossible argentin et littéraire.