Vendredi 6, à Nantes, le matin pas très tôt

Lu un roman de Paco Ignacio Taibo II : Sentant que le champ de bataille… Du policier de Mexico DF, comme il dit. Très court. Le titre laissait présager autre chose, un peu plus d’ampleur et d’inattendu — à moins qu’il faille le traquer dans les interstices du récit, en lisant sans se faire accrocher par les détails d’une histoire somme toute banale, et qui sera sans doute vite oubliée comme la façon dont elle est écrite ; presque en lisant sans lire, comme lorsqu’on s’exerce à apercevoir des images en trois dimensions : il faut s’efforcer d’avoir le regard à la fois flou et précis1. Je n’y suis pas parvenu, si jamais c’est ce qu’il fallait faire. En tout cas c’est le type de bouquin qui laisse penser qu’être écrivain n’est pas très difficile.

1 C’était un truc très à la mode il y a quelques années. Je me rappelle la première fois que j’ai vu par delà la surface : chez Greg à Leiden, quand Fanny et moi étions allé lui rendre visite au printemps 94. Avant ça, impossible, je ne voyais rien, on avait beau m’expliquer. Ses copains de toutes les nationalités m’expliquaient à nouveau, et tout d’un coup c’était venu. Une révélation ; un peu gratuite, mais une révélation après tout. Même chose, pour continuer sur les effets d’optique anecdotiques, lorsqu’on parvient sur commande à renverser la perspective de la petite structure de fil de fer en forme de cône tronqué qui tient les bouchons de champagne : on la tient à bout de bras par un côté de la base qu’on a un peu tordu, en tenant un œil fermé, et tout d’un coup elle se met à se mouvoir dans un espace impossible. Fabuleux. Un bref bonheur.