Hier, mauvaise journée globalement. À cause de la ville déjà. Je supporte mal cet enfermement après avoir été beaucoup à l’air libre. Sur mon mail, il n’y avait toujours pas de réponse de la Thaïlande, et mes doutes reprennent ; j’ai peut-être été trop sûr. Autant j’ai tremblé d’hésitation lorsque j’ai dû passer à l’acte, autant maintenant je serai déçu que ça ne marche pas — la perspective d’une autre année ici à glandouiller n’a rien de plaisant. En sortant de la place où je m’étais garé devant chez Joris, je n’ai pas fait attention, et je suis rentré dans un type ; je lui ai froissé son aile. Première fois que je dois faire un constat d’accident. C’est bénin, mais suffisant pour entamer ma confiance déjà faible, et révéler ma maladresse dans l’espace (Joris l’a assez rappelé). Et dans la soirée, à la pompe ouverte 24h/24 à Hyper U, je me suis foutu de l’essence partout. Je m’étais placé du mauvais côté des pompes, celui où il n’y a pas de sans plomb ; après plusieurs essais infructueux sur la machine, dont je ne comprenais pas la raison, voyant déjà les gens attendre derrière moi, je me suis rabattu sur le super ; et c’est là que j’ai reçu une grande giclée sur moi, à la première pression sur la poignée : le moteur n’accepte que l’essence sans plomb, et l’orifice du réservoir est trop petit pour faire pénétrer l’embout qui donne du super normal. Il y a d’ailleurs inscrit only unleaded sur l’entrée du réservoir, mais je ne l’ai vu qu’à ce moment-là. Je croyais aimer l’odeur de l’essence, mais cette fois-ci, j’ai plutôt eu envie de vomir. J’allais dîner chez Arnaud et Sophie ; et là encore, malgré le plaisir de les voir[1], je n’ai pas été à l’aise. De toute la soirée, ma voix est restée comme enrouée, voilée (il fallait que je la râcle souvent, de manière inélégante, et pour aucun résultat). Avec les yeux qui brûlent, c’est un signe certain. Autant qu’inexplicable. Était-ce d’être seul avec eux deux ? Était-ce (pourquoi pas ? après tout) leur nouvelle maison un peu vide ? Quelle misère de n’être pas bien dans sa peau – elle n’était pas à ma taille ce soir, les orifices pour voir pas bien en face des yeux. Moi qui croyais que le Nouveau Monde, il suffisait juste de trouver la porte pour y entrer…
Parlé bien sûr de l’état de Sophie, qui a le droit de se lever à nouveau depuis jeudi dernier, qui faisait pour la première fois la cuisine depuis quatre mois (chose que j’ai appréciée à sa juste valeur) ; aussi de la petite à venir. Et à chaque fois, j’avais présent à l’esprit ce que m’a révélé Bérengère : ce n’est jamais venu à leur bouche ; j’aurais pu l’avoir rêvé. J’ai été joyeux de cette naissance attendue. Souhaitons que l’infirmité du bébé soit bénigne.
Toute la journée à mon morceau pour Clément. Vers vingt-deux heures, à la suite d’une fausse manipulation, j’ai perdu deux pistes entières. Je les ai patiemment reconstituées, après le moment de désespoir réglementaire, où j’ai pleuré de rage et failli briser deux ou trois assiettes les dents serrées. Je ne suis pas très satisfait de ce que j’ai fait. Ça manque de cohésion, et il y a peut-être trop. J’aurais dû tout repenser en entier, jusque à la structure, pour la faire évoluer selon les exigences de mes matériaux de départ. En conservant (en gros) la forme de la chanson de Clément mais sans tenir à l’intégralité de son contenu mélodique, je lui fait perdre beaucoup, avec le risque d’aboutir à un gros gâteau indigeste.
[1] Surtout Sophie ; elle ne m’a jamais posé les problèmes que j’ai souvent avec Arnaud. Malgré le nombre des années qu’on se connaît, deux timidités qui se rencontrent ne font pas bon ménage.