Vendredi 15

Lu une très bonne nouvelle de Sakaguchi Ango, « Une Femme et la guerre », qui évoque la période des bombardements sur le Japon en 1945 sur un ton inhabituel, jouisseur, et avec une sorte de rage — et plus celle de vivre pleinement le désordre qu’une « rage de vivre » au sens commun. Le type d’œuvre sur la catastrophe qui me plaît.

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Dans la mesure où la recherche, c’est d’abord affronter (pour la réduire) sa propre ignorance, je peux me dire chercheur.

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« Nous cherchons partout l’absolu et ne trouvons jamais que des choses. » (Novalis). À moins de s’aveugler[1], la vie n’est alors qu’une suite de petites défaites. L’essentiel est-il de continuer à se battre malgré cela ?

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Il faut du blanc, de l’espace, du temps ouvert

Ne plus laisser tant de fleuves s’épancher

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Grand intérêt de la structure des nouvelles de Ibusé Masuji, non construites autour d’un événement unique et à forte charge dramatique, mais d’un thème ou d’un moment — qui peuvent eux aussi l’être — (le bombardement d’Hiroshima dans « L’Iris fou »), avec une multitude « fragments », liés entre eux de façon analogique, ainsi que par l’œil du narrateur (l’écrivain lui-même). Leurs types sont assez variés, et il ne se dessine pas vraiment un corps du récit autour duquel tout s’organiserait ; de même sont nombreuses les analepses et prolepses.

Pour ce que j’ai pu en lire jusqu’ici, ce sont, de ce point de vue, de petits chefs d’œuvres. Il y aurait grand bénéfice à s’en inspirer.

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« Le plus haut degré de l’activité, c’est l’inactivité. Le plus haut degré de l’éloquence, c’est le mutisme. La parfaite maîtrise du tir à l’arc, c’est de ne pas tirer. »

[1] Ou d’avoir une volonté de fer (de faire ?) ; mais cela même ressortit peut-être de l’illusion.

Sakaguchio Ango en 1946