Mardi 23 mars 1999, Nantes

En rentrant ce soir, je suis passé chez Sonia lui apporter un document ; elle m’a retenu un moment, et a vite montré qu’elle voulait qu’on fasse l’amour : mais je n’y étais pas très disposé, je me sentais sale, fatigué, j’avais envie de rentrer chez moi, et elle avait une haleine désagréable (en fait, sans ça, je me serais peut-être laissé tenter ; mais vraiment, ça m’arrête — du moins lorsqu’il n’y a pas d’amour ; cela tend donc à enlever tout doute à sujet). J’étais embêté, parce que je sais que ça l’a déçu. Mais puisqu’il n’y aura, c’est probable, jamais rien de plus entre nous que ce qu’il y a pour le moment, mieux vaut aussi essayer d’avoir des relations qui passent par autre chose ; je ne les appelle pas absolument de mes vœux, mais je ne suis pas contre non plus. Sur le chemin, j’ai croisé deux connaissances, dont Séverine (je la connais un peu par Sylvain) place Graslin. Ça m’a fait plaisir : il faudrait être plus souvent dans le centre, on y rencontre toujours quelqu’un, on peut avoir de bonnes surprises. Mais voilà, je ne sors jamais l’après-midi. Autant mettre une croix sur mon travail sinon.

Longue conversation téléphonique ensuite avec Ermold, qui revient de Vidéoformes, à Clermont-Ferrand. Je craignais de l’avoir froissé la semaine précédente (ainsi que Marie-Charlotte, qui se froisse d’ailleurs vite — pas tellement avec moi cela dit[1]), en lui parlant d’une de ses ex, et de la complicité que j’avais cru déceler entre eux, mais il semble qu’il n’en est rien. Mes propos n’avaient rien de scandaleux de toute façon. Des contacts intéressants, m’a-t-il dit, avec la vidéaste Cécile Babiole, le collectif japonais Dumb Type, ou Tanaka (le DJ compositeur d’une partie de la BO de Tôkyô Eyes), que j’ai confondu sottement, lorsqu’il m’a donné son nom, avec Iimura, le vidéaste seventies dont VidéOzone a passé les bandes minimalistes en décembre. J’ai souvent la tentation de me faire plus savant que je ne suis : ça ne marche pas à tous les coups. Un nouveau récit de soirée branchée un brin catastrophique comme il en raconte souvent (sans valoir son expérience à Madrid le mois dernier, un véritable cauchemar à l’écouter, digne de donner le squelette d’un film comique), où une ravissante vidéaste colombienne — mais avec un accent allemand, il faut toujours en rajouter dans l’étrange ou l’exotique — n’a cessé de lui tourner autour sans qu’il ose tenter quoi que ce soit, jusqu’à ce qu’elle se fatigue, et qu’il rentre seul dormir à son hôtel. Difficile de savoir la mesure dans laquelle il invente sur le moment même où il raconte.

[1] Mais vue l’étendue de nos rapports, je suis conciliant.