Hier, traîné jusqu’au milieu de la nuit, encore.
Je suis allé voir Kadosh, d’Amos Gitaï. Seul, évidemment. Je me l’étais promis depuis quelques jours, pour m’arracher à l’isolement du bureau. Mais aller au cinéma seul, lorsqu’on ne rejoint personne après, est-ce vraiment sortir de son isolement ? Vraiment, je ne suis pas très fort. Vraiment pas grand-chose… J’ai du mal à travailler, je me remets à douter ; et des doutes qui vont bien au-delà de ce petit calvaire finalement anodin. Je ne vois le bout de rien. Bref, pourquoi agir ? Tout me fait peur, rien ne me fait envie assez pour que je m’y lance à corps perdu. Il faut toujours que la majeure partie de moi demeure en retrait, regarde d’un air circonspect, déconseille à l’autre partie d’y aller, à quoi bon, etc. Je n’ai encore pensé à rien pour l’IUT, je ne sais pas ce que je vais pouvoir leur faire faire, et on ne m’a pas donné d’indications précises non plus. Qui plus est, ça ne m’intéresse pas, évidemment. Il y a l’argent à la clef, mais c’est trop abstrait pour le moment. Et dont je n’aurai de toute façon pas le loisir de profiter cette année. Ces cours là-bas me font flipper, je n’arrive pas à adopter le détachement qui siérait. J’ai pensé, en plus qu’avec cette connerie d’histoire d’un bout de mon salaire à me retirer, à cause de la fin de ma dernière année de pion, ça allait certainement faire des difficultés avec le rectorat, vu que ces crétins ne me l’ont pas retiré ; je m’attends à ce qu’ils refusent de me donner un certificat de fin de paiement pour que mon contrat soit validé, ou quelque chose dans le genre : et je n’ai aucune envie de m’investir là-dedans, de me battre pour ça.
Peut-être que le film n’a rien arrangé. J’y suis allé tendu, j’en suis revenu tendu ; parce que c’est dur. Comme d’habitude, sur le chemin du retour, je commençais, sans même y faire attention vraiment, à bâtir le commentaire que j’allais en donner ici, mais maintenant, comme trop souvent maintenant, je suis fatigué, et le sentiment de l’inutilité, de l’artificiel m’envahit. Ah, je ne me sens vraiment pas journaliste ! Incapable de faire abstraction de soi, de ses petits problèmes. Mais ici, ça n’aurait non plus guère de sens. Je parlerais bien du film quand même, mais je vais être ridicule. Il faudrait que j’attende ; demain : mais peut-être que le temps sera alors passé. Après tout, rien n’oblige à raconter ce qu’on a vu ou fait ; c’est idiot, quand on y songe, même. Mais moi, j’ai l’impression que je vais perdre quelque chose ; qu’il faut absolument que j’en laisse une trace. Pourquoi ? je n’en sais rien. Faut-il trouver des réponses à ce genre de pourquoi, si les plus importants, les plus cruciaux n’en ont pas ?