À cause de tout ça, de ce nouvel accès de mon sentiment si puissant de déchéance, je ne me suis levé qu’à onze heures passées, et le reste de la matinée, je l’ai dépensé à lire un récit d’Amélie Nothomb[1] (Stupeur et tremblements) ; comme il comptait les incroyables avanies et humiliations qu’on lui a fait subir dans une entreprise japonaise où elle a travaillé, cela ne m’a que poussé à adopter une grille d’analyse de ce type pour ma situation présente. Impression, lourde, que toute la responsabilité d’un échec de la manifestation à venir va me retomber dessus. Ermold ne fait qu’en rajouter ; son angoisse me fait peser un poids sur les épaules qui en deviendrait presque insupportable. Il faut être léger pour réussir à lui résister. J’aurais bien envie de tout laisser tomber, de lui faire sentir que ce serait par sa seule faute, mais ce serait trop facile[2]. C’est tout de même un pauvre type ; qui s’acharne à humilier les autres (je dois être un de ses sujets de prédilection, parce que je suis proche de lui, mais plus jeune et relativement fragile) : les humilier pour faire passer l’humiliation qu’il sent de sa propre médiocrité, dont il est englué depuis trop d’années.
Appelé Xavier en début de soirée pour lui souhaiter son anniversaire (avec un jour de retard, mais hier, je n’ai vraiment pas trouvé le temps). Il me parle des paysages des environs de Marseille, du fait qu’il a maintenant « une vie de parent », et de questions professionnelles : bref, nous n’avons pas grand-chose à nous dire.
[1] Pas désagréable, mais sans vraies conséquences ; ça se lit ridiculement bien.
[2] Même si j’aurais bien besoin d’avoir l’esprit libéré de ça pour m’occuper d’autres activités de plus grande conséquence.