Comment n’y ai-je pas repensé avant ? Le souvenir, aigu comme un dard, m’en a inondé l’esprit alors que je marchais dans la rue. Hier, Florence me racontait qu’elle était allée au vernissage d’une expo dans la galerie où travaille la copine de Jérôme à Paris, et comment toutes les galeries de la rue, où elles fourmillent, regorgeaient d’une population jeune et ultra-branchée (avec ce mélange de commisération et d’attirance qu’il faut lire sans elle, puisqu’elle ne l’avouera jamais ; cherchant le nom de l’une d’entre elles qui lui échappait, elle partit, lâchant la bride à ses propos, dans un « elle a un nom de prénom, je ne sais plus… Yvan, quelque chose comme ça… » : aussitôt mes dents se serrèrent à l’évocation, droit sortie de l’inconscient, de celui que j’avais considéré auprès d’elle comme mon rival le plus dangereux ! Quelle impudence de sa part ! Peut-être n’était-ce qu’une association d’idées sans conséquence, comme cela arrive à tout le monde, un enchaînement rhétorique : mais comment le croire, surtout quand on sait comment fonctionne Florence Lemoine. Ce que je peux parfois la détester autant que l’aimer, de mon impuissance jalouse ! Me voilà bien misérablement proustien dans mes sentiments… Dévoré de souffrance par mes propres monstres !