Jeudi de matière fluide et claire (2 novembre)

Écrit deux pages hier, mais fort tard et en buvant beaucoup. Je creuse la fosse qui de tous temps, sans doute, m’était destinée. Il semble difficile que je sache arrêter ; et plus tard, s’il faut travailler en état de grande tension, il me faudra boire à nouveau, c’est probable. La moindre phrase, souvent, je dois me l’arracher de force ; quand tout me semble, en esprit, souvent si clair et emboîté fermement.

De la journée, je n’ai quitté l’appartement. J’espérais voir Yoda, mais Ermold, avec qui il avait rendez-vous, ne m’a pas rappelé. J’ai laissé un message en ce sens sur son portable, mais je n’allais pas non plus être implorant. J’ai fini par téléphoner à Florence — à reculons. Mardi matin, elle avait appelé pour s’excuser d’avoir été si indifférente à mon égard la veille. Nous avons parlé du concert de Loïc à Paris mardi, puis de la séance chez elle pour enregistrer la chanson qu’il veut lui faire chanter en duo — une chanson qu’elle m’a dit ne pas beaucoup aimer ; si Loïc ne décolle pas, ne serait-ce pas parce qu’il a moins de talent que « Philippe » ou « Dominique » lorsqu’ils ont commencé ? se demande-t-elle. Elle a dit sa surprise de constater les difficultés de l’autre fille à chanter juste, à retenir la mélodie de Loïc. Au mariage où nous sommes allés en septembre, je l’ai pourtant surprise à chanter très faux ; mais elle a affirmé n’avoir presque toujours eu besoin que d’une prise. Elle n’a par ailleurs qu’un tout petit filet de voix.

Essayé de savoir avec qui elle était au concert ; elle a parlé d’Ivan : j’ai été heureux de l’entendre dire qu’elle le trouvait un peu « gris ». Enfin si ce n’est pas lui, c’est un autre. Il faudrait n’être qu’ami avec elle. Son attitude ne changerait en rien ; mais je prêterais moins le flanc à des petites souffrances de tous ordres, ainsi qu’aux ricanements d’Ermold le Noir qui me voit écrasé sous son joug.