Jeudi 10 février 2000, Nantes

Pas réussi à me lever avant onze heures. Départ rapide de chez Florence sous la pluie. Quasi pas de travail en perspective puisque j’ai décidé d’aller à Rennes cet après-midi (il faut bien montrer de temps en temps que j’existe toujours). J’aurais pu me lever vers huit heures, mais cela aurait signifié emmener (seul) la petite à l’école en partant : et de ça surtout, je n’ai pas voulu. Je ne sais pas quel est le rôle de sa présence dans ma réticence, mais elle ne me facilite pas les choses ; ça tend à me bloquer. À Rennes ; route sous une pluie battante. Contrairement à la première où j’étais allé, conférence de Gagnepain très intéressante. Il est tout de même incroyable qu’il ait cette énergie, allant sur ses 78 ans. Ce type est un phénomène. Fasse que justice lui soit un jour rendue ! J’y travaillerai de mon mieux en tout cas. À la fin, Branger m’a abordé pour parler de l’avancement de mon travail ; j’ai été un brin geignard (mais de cela, je ne me suis rendu compte qu’après). Mais il veut que j’avance, et me laisse entrevoir des perspectives de postes pour ensuite, ce dont il ne m’avait jusque-là jamais parlé – bref, une manière de me prendre sous son aile. Il ne faut donc pas le décevoir. Retour plein d’énergie.

Rendez-vous en début de soirée avec Philippe Bertrand au Flesselles, puis avec Joris et D. (pour parler de son projet original d’association mécène : pourquoi pas ?). Tous les trois ensuite en face, mais où je ne leur accorde pas toute l’attention due, à cause de la présence d’Ermold et de sa bande adalardienne, ainsi que de Marc Ausone, très intéressé par notre idée de montrer du Bénazéraf. Puis, vers minuit, chez Florence, sans beaucoup dc’envie[1]. Elle s’est montrée inquiète de ce que je n’avais pas téléphoné comme je lui en avais donné l’assurance ; ça m’a encore moins donné envie d’être là. Et ce qui pouvait arriver est arrivé, les propos ont fini par dégénérer, et nous nous sommes retrouvés au bord de la séparation — je n’ai pu m’empêcher de lui faire part de tous mes doutes à notre sujet, du peu de foi que j’ai dans notre relation. Nuit horrible, donc ; surtout pour elle peut-être, mais où je me suis senti atrocement gêné, oppressé au-delà du supportable. Je sens maintenant ma relation avec elle presque avant tout comme une pression angoissante. La peur habituelle de me perdre.

[1] J’ai commencé par oublier mes affaires (cartable, parapluie) dans le bar, ce dont je me suis rendu compte au moment de mettre la clef dans la serrure de sa porte d’immeuble : Ermold, goguenard – et plutôt compréhensif – l’a évidemment interprété dans le sens qu’on imagine lorsque je suis retourné prestement les chercher.