Ce matin, je me suis décidé à aller chercher à la médiathèque les articles sur les manifestations de VidéOzone que nous n’avons pas eu sur le moment. Recherche longue et fastidieuse, pour un résultat minime. Rentré à pied sous une pluie battante sans parapluie. Et maintenant, aucun ressort pour me mettre au travail (essayons tout de même de ne pas faire la sieste). Sur le chemin, quelques jolies filles.
Comme je ne mets jamais les pieds dans cet endroit, je ne connais pas les horaires, et suis arrivé une heure avant l’ouverture. Pour passer le temps, je suis allé faire un tour à Coiffard, bien décidé à ne rien acheter ; mais je n’ai pas tenu. Enfin je n’ai pas acheté de littérature, je me suis tenu à ma promesse de lire d’abord la bonne trentaine de livres encore non lus dans ma bibliothèque[1] — sauf un petit truc, de ceux qui me plaisent beaucoup, le Traité sur les contradictions & différences de mœurs entre Européens et Japonais, du P. Luís Fróis, un Jésuite portugais qui vécut trente ans au Japon dans la seconde moitié du XVIe siècle[2] ; un petit précis taxinomique d’ethnographie comparée à la mode du temps (donc sous forme aphoristique, où l’anecdote ne se faufile que par accident dans une recension qui se veut rigoureuse, mais est plaisante par là-même). J’ai pris aussi un petit dictionnaire de l’art bon marché et très bien fait, dont Florence a un exemplaire que nous avons longuement regardé ensemble chez elle (qu’on regarde des livres ensemble est un de ses grands plaisirs lorsqu’elle est amoureuse), et un gros bouquin des éditions Taschen sur l’art très récent, un achat que je prévoyais de faire depuis longtemps pour avoir quelques bases sur ce qui se fait — à part quelques noms, quelques œuvres, je n’ai aucune connaissance de l’art qui se fait aujourd’hui ; je peux bavasser dessus longuement si l’occasion s’en présente, mais c’est de la forfaiture.
Ensuite, comme l’heure n’était pas encore passée, j’ai fait un tour à la FNAC. Là non plus je ne voulais rien acheter, mais dans les bacs à prix réduit, il y avait l’album de son ex sur lequel Florence chante. Mon cœur a bondi, et je l’ai pris fébrilement, comme si c’était un objet interdit. Je me souviens (peu) d’un morceau que j’avais entendu à la radio plusieurs fois à l’époque, mais je n’ai jamais écouté le disque. Aux vacances de Noël, Loïc m’avait proposé de me les prêter, mais ensuite, bien sûr, j’ai préféré ne pas les lui redemander. Je n’ai pas encore osé l’écouter, et il a même fallu que j’allume une cigarette pour écrire ces lignes. C’était bizarre, cette impression nette de découvrir un moment de sa vie intime dans un lieu public. Très fétichiste. Reporter sur les objets ce qu’on ne peut plus avoir en chair et en os…
[1] Ce qui va prendre du temps, vu le peu de moments que je peux consacrer à la lecture en ce moment. Je n’ai déjà lu que la moitié de Babitt (mais en anglais, si je perds ma concentration, je ne comprends plus grand-chose).
[2] Ce qui rassemble donc au moins trois de mes intérêts.
« Chez nous, les hommes entrent en religion pour faire pénitence et pour leur salut ; les bonzes le font pour échapper au travail et vivre en repos parmi les plaisirs. »
« Chez nous, la pureté de l’âme et la chasteté du corps sont enseignées ; chez les bonzes, toute la vermine intérieure et tous les abominables péchés de la chair. »
Comme vraiment je n’arrivais pas à travailler, j’ai répondu à un message de Radulphe qui se proposait de me détourner de mon bureau pour aller boire des coups — alors que j’ai laissé sans réponse de multiples messages de Sonia. Et nous avons bu comme des trous, au 13 & 3, puis à l’Atomixeur. Longtemps que je n’étais pas allé dans un bar, et ça m’a fait du bien, même si ce n’étais pas non plus une cure de jouvence. Broerec était dans un de ses mauvais jours, jusqu’à ce qu’après la proposition de Radulphe d’aller voler la voiture de son ancienne copine pour aller en Roumanie et l’y revendre, l’idée de louer à son père le vieil Espace qu’il veut vendre ne le déride : ses problèmes d’argent pour y aller devait compter dans son état d’esprit, mais à le voir, on pouvait être sûr qu’il y avait autre chose (qu’il n’a pas voulu révéler). Pour un peu, je me serais laissé tenter. Mais je dois terminer pour fin avril maximum, et c’est déjà très serré.