Mercredi 16 août 2000, Nantes

Je ne sais pas pourquoi, réveillé tôt, et levé après le journal de sept heures. Lu deux heures d’un bouquin italien sur les philosophes et les machines au début de l’époque moderne, que j’avais commencé hier soir dans mon fauteuil sous l’halogène en buvant du Caol Ila. Un livre intéressant, mais qui n’apporte rien par rapport aux énormes sommes de Gusdorf sur la question. Couru ensuite toutes les librairies de Nantes, en quête de la BD sur l’histoire de la dance music parue cette année, pour l’offrir à Mathix ; quête vaine. Au départ, j’ai résisté à la tentation de prendre quelque chose pour moi pour compenser. Mais j’ai terminé par la FNAC, en désespoir de cause, et je suis finalement reparti sans rien pour lui, mais avec le dernier Dupuy & Berbérian (un nouveau recueil des aventures de Monsieur Jean, mais en noir et blanc et chez un autre éditeur que d’habitude), This is our music d’Ornette Coleman, au saxophone strident et ultravitaminé, un concert d’Eric Dolphy, et le tout récent album de Movietone — ce qui, à première écoute un peu distraite, me semble un bon choix ; je le mettrais dans la même famille que l’album de Mark Hollis, pour le côté méditatif, et la couleur instrumentale (piano, clarinette, violoncelle, qui s’accordent bien avec le reste de l’instrumentation, plus « rock »).

Le sous-marin atomique russe Koursk est accidenté par cent mètres de profondeur depuis quatre jours en mer de Barents. Cent dix-huit hommes d’équipage à bord, aucun contact radio, des réserves d’oxygène qui s’épuisent (plus de coups frappés en morse depuis la paroi intérieure du bâtiment comme les premiers jours), une mer démontée, pleine de courants violents et contradictoires, qui fait échouer les tentatives de sauvetages (en elles-mêmes déjà complexes), et au final, l’acceptation par la Russie des propositions d’aides occidentales (jusqu’à celle de l’OTAN) — après qu’un orgueil militaire ait voulu qu’ils agissent d’abord seuls.

Il doit régner autour de cet accident une angoisse terrible ; celle des sauveteurs dont rien ne dit qu’ils parviendront à pénétrer à temps dans le sous-marin (la probabilité en décroît d’heure en heure), celle des marins surtout qui voient s’approcher l’heure de leur mort par asphyxie. Je n’ai suivi cela que de loin, par les informations à la radio, mais cela doit être affreux. Un scénario de film hollywwodien si jamais ça se termine bien, mais la probabilité en décroît d’heure en heure…

À nouveau beaucoup pensé à Florence aujourd’hui, à son corps, à son odeur si suave, au sourire qu’elle avait pour moi lorsqu’elle était amoureuse. Je l’ai sentie contre moi ; sa taille un peu grasse, et sa peau de la plus intense douceur, ses seins lourds, lorsqu’elle se tenait assise dans le lit…