Ce matin à Saint-Nazaire ; mon emploi du temps pour cette année me satisfait : six heures plutôt harmonieusement réparties le lundi, trois le mardi après-midi — et sur seulement vingt et une semaines. L’amusant, sur la route, a été de constater le peu de voitures qui m’ont doublé : à cause du blocus des dépôts de carburant par les patrons routiers mécontents, la plupart des stations sont déjà vides, et les automobilistes roulent moins vite pour économiser ce qui leur reste d’essence. De retour dans le centre de Nantes, le cours des Cinquante-otages était entièrement bloqué par un flot de taxis, ambulances à l’arrêt — même quelques tracteurs (ces corps de métiers protestent eux aussi contre le prix du carburant). J’aime ces moments de pagaille. Il est seulement dommage qu’ils ne durent pas plus longtemps et ne soient pas plus intenses.
« À tous les étages de la société, sauf quelques salons parisiens, l’observateur retrouve les mêmes ridicules que différencient seulement la transparence ou l’épaisseur du vernis. Ainsi, les conversations substantielles sont l’exception sociale, et le béotianisme défraie habituellement les diverses zones du monde. Si forcément on parle beaucoup dans les hautes sphères, on y pense peu. Penser est une fatigue, et les riches aiment à voir couler la vie sans grand effort. (…) Cette observation fera peut-être aussi comprendre l’infertilité des salons, leur vide, leur peu de profondeur, et la répugnance que les gens supérieurs éprouvent à faire le méchant commerce d’y échanger leurs pensées. »